Est-ce que la Révolution Tranquille a permis aux Québécois de s’enrichir? Les Québécois s’enrichissaient à l’époque, alors ca doit être vrai. En effet, la croissance économique au Québec était plus rapide au cours des années 1960 qu’au cours des années 1940 et 1950. Néanmoins, elle s’est accélerée en Ontario aussi et en Nouvelle-Écosse aussi…
Ce n’est pas révolutionnaire si tout le monde le fait en même temps, ca s’appelle être dans l’ère du temps. Vous ne me croyez pas? Ok! Regardons l’ensemble des indicateurs de revenu personnel au Québec entre 1945 et 1975. En somme, observons ce qui se passait pendant la Grande Noirceur et la Révolution Tranquille. Dites-moi si vous voyez une brisure dans la tendance?
Voyez-vous une brisure? Vraiment là, parce que je me demande si je suis aveugle. Après tout, la Révolution Tranquille est supposément la période de libération économique des Québécois! N’est-ce-pas?
Soyons clairs, la Révolution Tranquille n’a rien de révolutionnaire. Certes, un Québécois en 1975 avait une meilleure qualité qu’en 1960 et si je devais choisir entre naître en 1960 et 1975, je prendrai 1975 parce que j’aurai grandi avec davantage de moyens. Mais si j’étais un Québécois en 1960 et que je me souciais de rattraper économique l’Ontario et égaler le niveau de vie de ses habitants, je serai indifférent entre 1960 et 1975 (en ce qui concerne le rhytme de rattrapage et non pas le niveau).
Note: Pourquoi j’utilise des dollars de Toronto de 1960$ Parce que les indices de prix provinciaux n’existent pas avant 1979 et j’ai des indices de ville – crées avec des paniers plus petits que ceux de l’IPC – que je me sers pour estimer l’inflation. Néanmoins, la littérature économique relate souvent les difficultés techniques des séries utilisants un indice inter temporel seulement lorsque les prix sont composés avec de petits paniers (voir Emery et Levitt, 2003 dans Canadian Journal of Economics). Il faut donc les attacher à une région aussi. C’est pour cela que vous verrez les comparaisons que je fais par section de temps. Tout avant 1975 utilisera les indices de prix urbains crées par les économistes Emery et Levitt dans CJE en 2003 et les Statistiques Historiques du Canada pour Montréal. Après 1975, je me servirai des indices de prix de Statistiques Canada qui seront seulement comparés dans le temps et non pas par région. Notez que pour la période avant 1975, si j’utilisais un indice non-régional, mon argument serait plus fort parce qu’il accentue les tendances observées. Alors, mon estimation est plus conservatrice ici.
Mon cher Vincent,
Très intéressant ce graphe. Néanmoins, je me demande si tu as pris en compte la différence du coût de la vie entre Montréal et Toronto. Le fait que les indices de prix soit ceux de Toronto porte à croire que non. Il est bien connu que le coût de la vie à Montréal est nettement inférieur à celui de Toronto ou d’autres villes canadiennes. Cet aspect, s’il n’a pas été prise en compte, peut modifier grandement les données. Certes, le PNB restera sans doute identique à celui de ton graphe, mais l’indice le plus important, à mon sens, reste celui du niveau de vie. En conséquence, il serait intéressant d’ajouter une courbe à ton graphe pour mesurer la différence des niveaux de vie entre Montréal et Toronto au cours de la même période. Je suis persuadé que la Révolution Tranquille y a particulièrement joué un rôle important, notamment à partir de 1962 avec la réduction des coûts de l’énergie qu’à entraîné la nationalisation de l’hydroélecticité.
Au plaisir!
Marc-André Pharand
La “révolution” tranquille n’en était qu’une socialiste. Vraiment rien de neuf sous le soleil
Marc-André : Les $ de Toronto de 1960 sont des mesures d’inflation pour Montréal et Toronto. Je m’explique. Pour assurer que la série soit meilleure (considérant qu’il y a moins de biens et services dans le panier pré-1975), il faut qu’il y aille un indice intertemporel et interrégional. Toute mesure d’inflation utilise les prix d’une période courante et/ou les quantités et/ou les compare avec les prix et quantités d’une période de base. (Voir Indice de Prix de Laspeyres ou Paasche ou Chain-Linked sur wikipedia pour une discussion basique). En histoire économique, il est préférable qu’on lie les indices à une région. Alors le panier de référence c’est celui de Toronto de 1960. Mais l’évolution des prix est celle de Montréal. Par conséquent mon analyse tient compte du niveau de la vie de Montréal.
Par ailleurs, Marc-André, si tu es intéressé par la discussion sur la mesure des prix (un problème pour l’histoire économique canadienne pré-1960), il y a un article dans Canadian Journal of Economics (pas très technique) par Herbert Emery et Clint Levitt de 2003. Il y en a un autre de Chris Minns dans le même journal de 2007 (qui crée un indice de prix par ville en utilisant les dépenses des pénitenciers).
(Quant aux prix de l’électricité, la réponse c’est non. Elle n’a pas eu d’effets différentiel important puisqu’il s’agit d’une part minime du budget et les prix de l’électricité suivant la nationalisation ont baissé surtout en région, en fait, il est possible que plusieurs consommateurs montréalais aillent payer plus cher suivant la nationalisation)
Merci de ta réponse!
Ton analyse démontre en effet que l’émancipation économique des années 60 s’inscrit plutôt dans une tendance historique que dans une rupture avec le passé. À la lecture du graphe, je ne peux tout m’empêcher de remarquer que la croissance s’accroit beaucoup au début de la période 70-80. Ce pourrait-il que ce soit là une conséquence des choix économiques des années 60 ?
En effet, les changements économiques prennent du temps à faire sentir leurs effets. Par exemple, nous ne notons les conséquences des plans de relances de 2008 que depuis 2011, et encore… Certes, le regain de confiance sur les marché boursiers est une conséquence immédiate, mais ça prend généralement plusieurs années avant de noter une différence sur les indicateurs macroéconomiques. Ainsi, considérant ce fait, serait-il possible que la plus forte croissance de l’économie québécoise dans les années 70 soit le résultat des décisions des années 60 ? Une comparaison avec la croissance de l’économie de l’Ontario pour la même période serait à ce titre approprié il me semble, non ?
Non, la raison c’est que l’Ontario ralentit. C’est pour ca que je compare le Québec avec d’autres pays dans d’autres graphiques et posts à venir. À toutes fins pratiques, l’économie canadienne ralentit beaucoup dans les années 1970 mais celle du Québec ralentit moins vite que l’Ontario. Mais l’économie de l’Alberta et de la CB évoluent plus rapidement que le Québec.
Ce qui est étonnant, c’est la croissance des années 1960 parce qu’une partie considérable du rattrapage éducationnel du Québec s’est produit entre 1945 et 1960 (après avoir décliné en termes absolus!!!! dans les années 1920-1939).
En fait, si on prend 1976 comme année de base et qu’on fait un indice de la croissance économique réelle de Finlande, Suède, Québec, Canada (ROC sans Ontario), Ontario, États-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, Australie, Nouvelle-Zélande, Irlande, Suisse, Autriche, France, Italie, Belgique, Pays Bas, Danemark et Japon, le Québec arrive dans le fond du baril et qu’on va jusqu’à la récession de 1990, le Québec est dans le fond du baril. La situation relative du Québec s’empire si on continue jusqu’en 2009.
Les récessions sont étrangement plus clémentes au Québec qu’ailleurs, toutefois la croissance en période d’expansion y est aussi plus modeste de beaucoup. Au final, l’écart se creuse davantage au Québec.
Il ne faudrait pas oublier de prendre en compte la croissance par habitant. Si on ne prend que la croissance brut, certes, le Québec est “médiocre”, mais comparativement au autre territoire comparée, nous ne sommes que 7,5 millions d’habitant, alors que les USA sont plus de 330 millions ! Si on ramène le niveau de comparaison à la croissance par habitant, le Québec surpasse les USA 1 année sur 2 (à partir de 1990 cependant, je n’ai pas les chiffres auparavant). Et comme tu le fais remarquer, la présence de l’État dans l’économie permet de tempérer la virulence des crises économiques, même si ça tempère aussi la croissance à certain moment. Au final cependant, notre économie est beaucoup plus stable que celle des États-Unis par exemple. Notre économie est beaucoup sensible aux fluctuations et à la spéculation que celle de nos voisins du sud.
Comment passer à côté du sujet ! La libération économique des Québécois, c’était avant tout d’avoir repris le contrôle de nos institutions économiques. D’avoir nationalisé l’électricité. D’avoir lancé des entreprises d’État qui nous rapportent collectivement au lieu d’exporter des capitaux. Ce graphique réducteur ne dit pas que le Québécois de 1950 avait un boss de Toronto et que celui de 1975 avait un boss de Montréal.
reprise des institutions? Elles étaient contrôlées par un pays étranger?
” D’avoir lancé des entreprises d’État qui nous rapportent collectivemen”
ouain… HQ a versé son premier dividende 20 ans après la méga nationalisation, et les alumineries coutent plus chers qu’elles ne rapportent
Le graphique est par habitant, j’aurai du le mentionné, c’est mon erreur. Quant au truc de 1990, ce n’est pas vrai. L’écart demeure constant et il N’est pas du qu’au taux de change. En fait, en utilisant la PPA, le Québec a un écart légèrement croissant depuis 1990. En fait, la seule raison que l’écart se ferme c’est que la récession actuelle fait ralentir les États-Unis.
Alors comment expliqué ceci ? http://go.pq.org/9cr Il n’y a pas vraiment d’écart entre les deux, sinon que ça prouve que notre économie est beaucoup moins sujette aux fluctuations que l’économie américaine.
P.S. Dans le graphe, le Québec est la courbe noir. Les USA sont en gris. Désolé pour la qualité, mon scanner n’est pas très bon !